Remplaçant avant le début du Mondial, Franck Ribéry est devenue la nouvelle star de l'équipe de France. Il garde néanmoins les pieds sur terre. La Coupe du monde, la demi-finale, Zidane... le Marseillais vit un rêve en Allemagne. Mais, malgré l'enjeu, ne se se met pas la pression.
FRANCK RIBERY, dans quel état d'esprit est le groupe aujourd'hui ?
F.R. : L'état d'esprit est très bon. Vous savez, lorsque vous gagnez, ça se passe toujours bien. Maintenant, le plus important c'est de bien se préparer pour le match du Portugal. Ce sera très dur. Je pense même que ce sera plus dur que le match contre le Brésil. Parce que ce sera une demi-finale. Il n'y aura peut-être pas plus de pression mais le Portugal voudra aussi aller en finale. Ils sont là pour ça mais nous aussi. Il faudra être prêt et entamer le match comme on le fait depuis l'Espagne.
Pourquoi le Portugal sera-t-il plus difficile à jouer que le Brésil ?
F.R. : Collectivement, c'est une équipe qui est meilleure que le Brésil. Défensivement, ils sont aussi très forts. En plus, ils ont de bonnes individualités comme Cristiano Ronaldo, Deco ou Pauleta que l'on connait bien. Cristiano Ronaldo est un joueur qui ne se pose pas de questions, il va vite, il est technique, il élimine facilement se adversaires.Les adversaires du Portugal ont reçu beaucoup de cartons.
Vous craignez d'être suspendu en cas de nouvel avertissement ?
F.R. : On ne s'occupe pas de ça. A nous de préparer le match le mieux possible comme nous l'avons fait face à l'Espagne et au Brésil. On ne pense pas vraiment à leur manière de jouer, leur organisation. Le plus important pour nous sera d'être bien en place et de bien démarrer la rencontre. On va se donner à fond pour gagner. Le risque de suspension en cas de carton n'aura impact sur mon jeu. Si je débute, je ferai exactement pareil que contre l'Espagne et le Brésil.
Avez-vous conscience du phénomène qui se développe autour de vous ?
F.R. : Tout ce qui se passe autour de moi, ça ne me perturbe jamais. Je ne fais pas attention à tout ça. Depuis que je suis professionnel, c'est vrai que beaucoup de choses sont allées vite pour moi. Mais le plus important est de toujours se remettre en question. Mais ça va tout seul. Quand vous avez de bons joueurs autour de vous, vous savez que les ballons vont arriver. Quand vous êtes dans une équipe où il y a, je ne vais pas dire des stars, mais des noms, vous n'êtes quand même tout seul sur le terrain. C'est plus facile de joueur avec des joueurs comme ça autour de soi. On prend plus de plaisir et de confiance. C'est sûr que les choses vont encore beaucoup changer pour moi après la Coupe du monde. Mais tant mieux.Vous êtes aujourd'hui titulaire en équipe de France.
Comment expliquez-vous votre ascension aussi rapide ?
F.R. : Je rigole toujours, je chambre. C'est aussi ce qui fait ma force. Je ne suis pas là pour rester dans mon coin. Je suis là pour m'exprimer que ce soit sur le terrain ou en dehors. Aujourd'hui, je suis très content pour moi et ma famille. C'est à moi de continuer et de surtout garder les pieds sur terre. Ce n'est que du bonheur. Jusqu'à maintenant, j'ai toujours fait de bonnes prestations sur le terrain. J'ai fait de bonnes choses. Je sais très bien qu'il y a des moments où ce sera plus dur pour moi parce que je ne pourrai pas toujours être à 100 % mais, dès que je suis sur le terrain, j'essaie de me donner à fond et me mouiller le maillot.
Pensiez-vous vous vivre un jour une telle aventure ?
F.R. : Franchement, je pense que personne ne pensait que j'allais arriver en équipe de France A et encore moins en demi-finale de Coupe du monde contre le Portugal. Mais j'ai toujours travaillé, j'ai toujours cru en moi. C'est sûr que j'ai connu des moments difficiles. Mais, aujourd'hui, je savoure ce qui m'arrive et je suis très heureux. C'est vrai que c'est ma première Coupe du monde. On est en demi-finale, on croise les doigts pour aller en finale. J'ai seulement 23 ans. Franchement, je ne pensais pas que ça se passerait aussi bien pour moi et pour le groupe.
Quels joueurs vous donnent le plus de conseils ?
F.R. : Tous les joueurs me parlent beaucoup, surtout ceux qui ont le plus d'expérience. Il y a Zidane, Henry, Thuram, Makelele, Barthez... Zizou et Thierry me parlent le plus. Ils me disent de continuer, de ne pas me prendre la tête, de jouer mon jeu... Depuis je suis ici, je suis content parce que tous m'ont bien accueilli. Ce n'était pas facile pour moi. Je suis jeune et c'était la première fois que j'évoluais à ce niveau. Donc je peux les remercier. Il y a une super ambiance et un bon groupe.
Et vous suivez leurs conseils ?
F.R. : J'écoute mais c'est dur. Zizou me dit parfois de gérer mes efforts, de ne pas toujours faire des sprints vers l'avant mais d'essayer d'alterner. Ce sont toujours des conseils positifs. C'est dur de les suivre parce que j'ai un tempérament qui fait que j'ai toujours envie aller de l'avant et de provoquer. Je n'arrive pas à gérer mes efforts. S'il faut faire dix sprints de suite, je vais les faire. C'est vrai que beaucoup de joueur me disent la même chose. A moi d'apprendre à le gérer. J'y vais à 100 % mais, si je suis fatigué, il y a aussi des joueurs sur le banc pour me remplacer.
Vous ne ressentez pas plus de pression aujourd'hui ?
F.R. : Oui, il y a de la pression. Surtout face à la Suisse où c'était mon tout premier match, ma première titularisation. On avait fait trois matches amicaux et, à chaque fois, j'avais fait de bonnes rentrées. En plus, c'était à 18h et il avait fait très chaud, cela n'avait pas été facile. Après ce match, je me suis un peu libéré. En tout cas, j'ai pris confiance petit à petit. Depuis, j'ai montré autre chose. Pour moi, mon but face à l'Espagne a changé des choses parce que j'ai pris encore plus de confiance. Vous savez, moi je suis quelqu'un qui ne prend pas la tête. Je ne mets pas de pression inutile. J'ai toujours eu l'habitude de ne pas avoir peur. A moi de continuer à aller de l'avant, provoquer et surtout ne pas me poser de question.
Etes-vous impressionné par le fait de jouer à côté de Zidane ?
F.R. : Impressionné... oui parce que j'étais sur le terrain et que j'étais à côté de lui. Ce n'est pas pareil qu'à la télévision. Jouer avec lui, c'est énorme, extraordinaire ! Tous les joueurs voudraient jouer avec Zidane. Pour moi, c'était un peu un rêve. J'ai tout fait avec mon club pour jouer cette Coupe du monde. Dans ma carrière, je pourrai dire que j'ai joué avec lui. Quoi qu'il arrive dans cette Coupe du monde, ça restera un grand souvenir. Cela dit, je ne suis pas non plus étonné de le voir jouer comme ça parce qu'on connaît quand même Zidane. Je suis vraiment content pour lui. Il le mérite. Il fait tout pour nous encourager et nous motiver pour qu'on batte le Portugal.Avec la Coupe Intertoto, vous avez disputé près de 70 matches cette saison.
Ça ne vous inquiète pas ?
F.R. : Non, pas du tout. Je suis jeune, je suis en bonne santé. Je fais quand même un beau métier, il ne faut se voiler la face. Etre footballeur, c'est un régal quand on joue au haut niveau. Une carrière, ça va très vite. Quand je vois que celle de Zidane se termine, moi je commence... donc il faut que j'en profite. Je ne me sens pas fatigué. Quand on a confiance, les jambes suivent. On est bien dans notre peau. C'est vrai que c'est dur à la fin car il y a beaucoup de pression, il faut rester concentré. Mais les joueurs qui sont entrés en fin de match ont toujours su répondre présent.
Avez-vous des échos du soutien populaire qu'il y a en France ?
F.R. : Ça nous touche, ça nous motive. En 1998, j'avais 15 ans. J'étais en ville en train de faire la fête comme tout le monde. Aujourd'hui, je vois les gens faire la fête comme je l'ai fait. Je l'ai vécu donc je sais ce que ressentent les gens. Je pensais juste à crier "Allez la France !". Je ne pensais pas que je jouerai une Coupe du monde et que je pourrais la gagner. Aujourd'hui, j'y pense.